de Perse en Iran . 4
été 1966
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En ce temps là, Sa Majesté Cha-Abbas régnait sur un royaume avide de divertissements ...
dans les nobles demeures intrigues et liaisons donnent aux artistes motif de création. 
Les salons étouffés de tapis, croulants de joyaux, résonnent des chants et danses des courtisanes.
La cour s'enivre des liqueurs d'occident et la raison sombre dans les nuits persanes,
lorsque les murmures s'assourdissent et que s'éteignent les flambeaux...

La nuit limpide enveloppe les palais d'un mystère complice ...
les galeries désertes laissent jouer quelques rayons.

La touffe d'un peuplier, le fuseau d'un cyprès, une branche décharnée et,
dans l'exaltation d'Esfahan émerge du lac de verdure la foret merveilleuse des coupoles d'azur.
Dans la douceur du ciel toute la nuance des bleus, dans les reflets d'eau toute la palette des verts.
Dans l'ombre ouatée des propylées toute la ferveur de l'âme mystique ...

Mosquée de Perse, immenses et majestueuses cathédrales où se rejoignent les verts et les bleus ...
indigo, outre mer, turquoise, lapis-lazuli et ce bleu qui a nom persan ... et d'autres encore
qui se chevauchent, s'imbriquent, s'entrecroisent. et sur ce fond éblouissant des fleurs,
des arabesques, des fleurs encore où se mêlent le jaune et le vert.
Tapis de céramique étendus dans l'azur, décor immuable pour quelque procession éternelle ...
tenture féerique, pages enluminées de merveilleux évangéliaires.

La grande voûte vibre des lumières célestes tout instant appelle le recueillement ...
une psalmodie dolente résonne en écho contre les piliers.
D
ans chaque mosquée monte la foi ardente aveugle et pure, incantations rituelles, gestes traditionnels. 
Les socques abandonnées sur la dalle d'entrée, veston et pantalon tombés sur le tapis,
en pyjama bouffant, chemise à l'abandon les fils de l'Islam suivant le chemin d'Allah
en de multiples prosternations.
Mosquée royale d'Esfahan, mosquée Lotfallah, Vakil de Shiraz, véritable cour des miracles.
croyants, étudiants et poètes s’y retrouvent vautrés sur les tapis dans une même foi.


Jardins de Chiraz surchargés d'une nature qui chante ... tapis de verdure incrustés
d'une myriade de pétales qui réjouissent le cœur du poète. . .
"j'avais rempli  de roses le pan de ma robe et je voulais vous les distribuer,
mais leur parfum m'a tellement enivré que le pan de ma robe s'est échappé de ma main."

.Aux portes de la ville c'est déjà le désert, les montagnes brunes et rousses collées
dans un ciel émaillé ... le désert c'est tout l'Iran, celui des paysans et des nomades,
celui des pistes et des bourgs de pisé.
La route ondule, suit les accents des dunes, le voyage est morose. . .
par place, dans la nudité de l'horizon, un peu de vert, quelques maigres saules autour d'un bassin,
un liseré de bleu pour faire chanter la blancheur d'une maison de thé.
Quelques briques noircies, un peu de braise incessante, une théière bichonnée
et un samovar symbole de l'hospitalité ...

Le thé est une institution, on en boit à toute heure, plus ou moins fort selon que l'on est
plus ou moins fortuné ...Dans l'ombre fraîche de la salle commune, le voyageur du désert
déguste son tchai' à petites goulées.
Dans un autre angle, las des cahots de la piste, des caravaniers se sont arrêtés ...
le maître de maison cérémonieusement a préparé les narguilés.
Dans la coupelle de terre cuite, une boulette de tabac mouillé, quelques morceaux de charbon rougi...


Nul n'a vu, recluse dans la courette, la femme du lieu, au regard voilé de celle qui attend,
loin des hommes, on ne sait quel horizon ...
        
 

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